En principe, l’autorité de la chose jugée ne joue qu’entre les parties au procès et par rapport à l’objet du litige. Pour qu’une décision ait autorité de chose jugée en matière civile, la demande, son fondement et les parties doivent donc être identiques (art. 23 C. jud.).L’article 89, §1er de la loi sur le contrat d’assurance terrestre du 25 juin 1992 dispose qu’«Aucun jugement n’est opposable à l’assureur, à l’assuré ou à la personne lésée que s’ils ont été présents ou appelés à l’instance». Il illustre ainsi le principe de droit commun rappelé ci-dessus, en y apportant toutefois une dérogation lorsque l’assureur, bien que n’étant pas partie au litige, a assumé la direction du procès: en ce cas,«le jugement rendu dans une instance entre la personne lésée et l’assuré est opposable à l’assureur» (art. 89, §1er in fine).Par son arrêt du 26 novembre 2009, la Cour de cassation a étendu le principe de l’autorité de la chose jugée en matière d’assurance en estimant que: «Lorsque la personne lésée a d’abord exercé son action à l’encontre de l’assureur et que celle-ci a été rejetée à défaut de responsabilité, l’assuré qui est ensuite interpellé par la personne lésée peut lui opposer le jugement rendu en première instance» (Cass., 26 nov. 2009, R.D.C., 2011, p. 119).Bien qu’il soit tiers au jugement intervenu entre l’assureur et la personne lésée, l’assuré peut donc l’invoquer afin de faire échec à l’action de la personne lésée à son encontre.Comme le souligne la Cour elle-même, la solution dégagée n’est en rien contradictoire avec la disposition de l’article 89, § 1er de la loi du 25 juin 1992. Par ailleurs, la personne lésée avait la possibilité d’exercer son action contre l’assureur et l’assuré en même temps. Les droits de la défense de la personne lésée ne sont en outre pas préjudiciés puisqu’elle a pu faire valoir ses arguments à l’encontre de l’assureur.Cet arrêt va néanmoins plus loin que la jurisprudence habituelle qui accorde une force probante aux jugements au profit des tiers (voyez notamment: Cass., 28 avril 1989, Pas., 1989, p. 914) et certains s’interrogent sur une possible extension de l’effet positif de la chose jugée de droit commun au profit d’un tiers de manière générale (voyez H. BOULARBAH, «Vers l’extension de l’effet positif de la chose jugée au profit d’un tiers à la décision de justice?», R.D.C., 2011, p. 122).Selon nous, il convient de rester prudent quant à l’interprétation à donner à l’arrêt du 26 novembre 2009 dont la solution se justifie probablement du fait de la relation particulière qui existe entre un assuré et son assureur, qui ont le plus souvent des intérêts communs.La Cour précise d’ailleurs que la solution dégagée, tant par les juges d’appels que par elle, ne l’a pas été au regard du droit commun de l’autorité de la chose jugée (art. 23 et s. C. jud.) mais bien au regard de la loi sur le contrat d’assurance terrestre.