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#luLex : Note d’information 24/1 du CAA relative à la notion d’intermédiaire d’assurances dans le cadre de contrats d’assurance collectifs

Dans nos publications de mars 2022 et février 2023 nous avions analysé l’évolution de la jurisprudence de la CJUE en matière de distribution de contrats d’assurance collectifs qui sont proposés par le preneur de ce contrat à ses clients.

La situation classique est celle d’une agence de voyage, d’un revendeur de matériel électrique ou électronique, d’un concessionnaire automobile, etc. qui conclut un contrat d’assurance « collectif » (ou « pour compte ») avec un assureur en vue de couvrir certains risques (annulation de voyage, perte ou dommages au matériel vendu, garantie étendue du véhicule, …) et propose ensuite à ses clients d’adhérer (moyennant paiement d’une certaine contribution) à ce contrat collectif, en vue de pouvoir bénéficier des prestations prévues en cas de réalisation d’un sinistre couvert.

Nous avions pu conclure que la CJUE considère dans ce cadre le preneur d’assurance collectif comme un intermédiaire d’assurance et qu’il découlait d’un arrêt du 29 septembre 2022 (affaire C-633/20) que doit être considéré comme un intermédiaire, avec toutes les obligations qui s’y attachent, « une personne morale dont l’activité consiste à proposer à ses clients d’adhérer sur une base volontaire, en contrepartie d’une rémunération qu’elle perçoit de ceux-ci, à une assurance de groupe qu’elle a préalablement souscrite auprès d’une compagnie d’assurances».

Le CAA vient, dans sa Note d’information 24/1 du 24 janvier 2024 , de prendre position par rapport à cette jurisprudence en soulignant qu’il n’y a pas d’automatisme, mais que la qualité de distributeur d’assurances (en plus de celle de preneur d’assurance) est fonction des circonstances de chaque cas d’espèce.

Le CAA qualifie de « Sponsor » le preneur d’assurance qui négocie avec l’entreprise d’assurance la mise en place d’un contrat d’assurance pour une série de clients-adhérents et le CAA représente de la manière suivante la relation entre les parties :

Il avance ensuite un certain nombre de critères – non exhaustifs – à la lumière desquels les assureurs et les preneurs d’assurance concernés peuvent évaluer la situation en vue de déterminer si le preneur doit être considéré comme un distributeur d’assurances ou non :

Caractère facultatif ou obligatoire de la couverture d’assurance : Au plus le client-adhérent a de choix (adhérer ou non, options dans la couverture, …), au plus il y a de probabilités que le Sponsor soit à considérer comme distributeur.
A l’inverse, si l’adhésion est obligatoire (l’on pense ici notamment au cas classique des clubs sportifs qui souscrivent des assurances collectives pour le compte de leurs membres et proposent l’adhésion à ces contrats de manière ‘automatique’ via la cotisation), le Sponsor ne sera en général pas un distributeur.

Rôle et responsabilité du preneur d’assurance : Au plus le Sponsor prend un rôle actif allant au-delà de la simple souscription du contrat collectif (gestion du contrat et des adhésions, gestion des sinistres, assistance dans le choix des options de couverture, …), au plus le Sponsor est à considérer comme distributeur.

Intérêt d’assurance : Si l’intérêt d’assurance existe exclusivement ou majoritairement dans le chef du Sponsor, il est moins probable qu’il soit à considérer comme un intermédiaire d’assurances (ce sera notamment le cas d’une entreprise qui propose par exemple des réparations, une assistance ou d’autres services en rapport avec les objets qu’elle vend et qui souscrit une assurance visant à la couvrir du montant des dépenses qu’elle devra engager pour l’exécution de ces réparations, assistances, …).

Importance du produit d’assurance au sein des produits/services fournis : Si le produit d’assurance est une composante importante, voire essentielle, de l’ensemble qui est proposé par le Sponsor, il sera plus probable que celui-ci soit à considérer comme distributeur.

Qualification du client-adhérent sous le contrat d’assurance : Dans le prolongement du critère de l’intérêt d’assurance, si en vertu du contrat d’assurance collectif le client-adhérent a une qualité de bénéficiaire du contrat (pouvant donc notamment exercer ses droits directement contre l’assureur), le Sponsor sera plus probablement qualifié d’intermédiaire d’assurances.

Les acteurs qui sont aussi actifs sur le marché belge, reconnaitront largement les critères qui avaient déjà été proposés en juin 2020 par la FSMA pour analyser ce genre de situations.

Si au terme de l’analyse de la situation, sur la base des critères ci-dessus ou tous autres critères pertinents, le Sponsor est à considérer comme un distributeur d’assurances, alors il devra soit obtenir son agrément comme intermédiaire d’assurance (agent, courtier, sous-courtier) ou alors demander son inscription à la liste des intermédiaires à titre accessoire (IATA), ce qui sera sans doute généralement la solution la plus indiquée.

Pour cette dernière catégorie, rappelons que les IATA sont exemptés d’obligations si toutes les conditions suivantes sont remplies (article 281-1 de la loi du 7 décembre 2015) :

a) l’assurance constitue un complément au produit ou au service fourni par ces personnes, lorsqu’elle couvre :

(i) le risque de mauvais fonctionnement, de perte ou d’endommagement du bien ou de non utilisation du service fourni par ces personnes, ou

(ii) l’endommagement ou la perte de bagages et les autres risques liés à un voyage
réservé auprès de ces personnes ;

b) le montant de la prime annualisée du produit d’assurance ne dépasse pas 600 € ;

c) par dérogation au point b), lorsque le produit d’assurance constitue un complément à un service visé au point a) et que la durée de ce service est égale ou inférieure à trois mois, le montant de la prime par personne ne dépasse pas 200 €.

Le distributeur devra ensuite respecter toutes les règles de conduite applicables aux distributeurs d’assurances dans sa relation avec les clients-adhérents.

Si le IATA est exempté, il appartient à la compagnie d’assurance de veiller à ce que les obligations à l’égard des clients-adhérents soient correctement exécutées.

En tout état de cause, les compagnies d’assurance ne peuvent collaborer qu’avec des distributeurs autorisés et doivent donc veiller à analyser les situations de leurs preneurs d’assurance collectifs, pour identifier – en concertation avec eux – s’ils remplissent les conditions pour être considérés comme distributeurs, avec les conséquences qui en découlent.